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AVANT-PROPOS

J’adresse des remerciements chaleureux à celles et ceux qui ont bien voulu répondre à l’appel des associations « ANPROMEVO » et « Marchand-Feraoun » à célébrer le cinquième anniversaire de cette première stèle dédiée à l’ensemble des victimes de l’OAS en Algérie et en France.

M. François Vauglin, maire du 11e arrondissement de Paris, où l’ANPROMEVO a son siège, regrette de ne pouvoir être à nos côtés de même que M. Serge Barcellini, président du Souvenir français, engagé de longue date pour une inauguration dans le département de la Marne.

Je salue collectivement les représentants du monde associatif, de l’édition militante, du monde combattant (UFAC, FNACA), de la mémoire (Comité Charonne) et de l’histoire (merci, Gilles Manceron de nous honorer une fois de plus de votre participation, vous dont le récent article sur Médiapart, intitulé Terrorisme et résistance, éclaire ce rendez-vous du 6 octobre !).

Bienvenue en particulier à M. Guillaume Lagane, chef du département harkis et rapatriés à la direction générale de l’Office national des Anciens combattants et Victimes de guerre, et à Mme Zoulikha Bekaddour, longtemps conservatrice en chef de la Bibliothèque universitaire d’Alger, incendiée par l’OAS le 7 juin 1962, date sur laquelle je reviendrai en conclusion de mon propos.

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Nous sommes le 6 octobre 2016.

2016 : soit dix ans après la naissance de l’ANPROMEVO.

6 octobre : soit cinq ans, jour pour jour, après le dévoilement par M. Bertrand Delanoë de ce monument qui nous réunit aujourd’hui, érigé par la Ville de Paris en hommage aux victimes du terrorisme de l’OAS.

Pour nous qui pratiquons la commémoration, les dates ont un sens, et leur rapprochement, pour moi, revêt une valeur symbolique.

Alors, parlons dates : dates et faits !

Le 19 mars 2016, devant le Mémorial national de la guerre d’Algérie, quai Branly à Paris, le Président de la République a affirmé que la paix des mémoires, « … c’est les reconnaître toutes et n’en oublier aucune » et que « Faire la paix des mémoires, c’est regarder vers l’avenir. »
À l’issue de la cérémonie, qui entrait dans le cadre de la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc, j’ai pu lui dire que je voyais dans ses paroles « une rupture avec quarante-deux ans d’État-OAS ».

Dès la semaine suivante, j’explicitais par courrier cette expression « État-OAS » en précisant :
– un État qui a laissé se développer les initiatives de toute nature tendant à glorifier les auteurs des crimes et attentats terroristes commis par l’OAS ou en son nom ;
– un État dont l’un des chefs a réhabilité des généraux putschistes, rebelles aux lois de la République et réfractaires à la démocratie ;
– un État au Conseil duquel on a fait dire, le 13 février 2003, que les victimes de l’OAS ne pouvaient pas être honorées de la qualité de « Mort pour la France » dès lors que l’OAS n’était pas partie belligérante au conflit ;
– un État qui, dans une démarche révisionniste assumée, a décoré d’anciens criminels de l’organisation considérés comme éminemment méritants et a laissé les jusqu’au-boutistes de l’Algérie française assimiler les victimes de l’OAS à des traîtres à la patrie.

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Ma proposition adressée à Monsieur François Hollande pour la mise en place d’un dispositif législatif et réglementaire de reconnaissance à l’égard de l’ensemble des victimes militaires et civiles de l’OAS ne reçut d’autre suite que sous la forme d’un décret du 13 mai (oui, 13 mai !) faisant de moi un officier dans l’ordre national du Mérite.

J’y ai vu le signe, émanant du plus haut niveau de la République, d’une considération accordée à chacune et à chacun d’entre vous, membres et amis de l’ANPROMEVO, cette promotion intervenant à raison de ma qualité de « président d’une association mémorielle ».

J’aurais pu – nous aurions pu – nous satisfaire de cette réponse.

Pourtant, le 19 septembre, au moment même où j’étais à nouveau salué par le Président de la République, dans le Jardin de l’Intendant de l’Hôtel national des Invalides, après l’hommage solennel rendu aux victimes et aux rescapés d’actes terroristes, Mme Isabelle Sima, chef de cabinet, signait une lettre m’assurant – je cite – de toute l’attention portée à [mes] attentes au sujet de la reconnaissance des victimes de 1’OAS, organisation terroriste de sinistre mémoire.

Oui, le 19 septembre, soit six mois après le 19 mars, comme si l’année, pour les victimes de l’OAS, était rythmée par deux dates entrant symétriquement en résonance.

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Le 19 septembre donc, la Présidence de la République indiquait :

–  La mention « mort pour la France » ne peut être inscrite de façon systématique sur les actes de décès des personnes victimes de I’OAS, quels que soient leur statut et les circonstances de leur décès, mais si certains cas ont été omis, cette mention peut toujours être attribuée par I’ONAC-VG, après examen particulier et dans le strict respect de la réglementation en vigueur.
–  S’agissant de l’affichage des noms des victimes civiles sur la colonne blanche du mémorial national de la guerre d’Algérie, il intervient sur demande des familles ou d’associations représentatives, après instruction par les services du ministère de la défense qui s’assurent qu’elles ne faisaient pas partie ni du FLN ni de 1’OAS.
Ces quelques lignes doivent être prises au pied de la lettre et encourager les familles et associations de victimes de l’OAS à engager dès demain, auprès des administrations concernées, des démarches pour obtenir ces actes de reconnaissance : reconnaissance d’une dette morale de l’État envers ces oubliés perpétuels de l’histoire de la guerre d’Algérie dont nous portons haut la mémoire.

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J’ai parlé de dates faisant écho à des événements, et je voudrais conclure par celle à laquelle le ministre de l’intérieur, Monsieur Bernard Cazeneuve, m’a adressé ses félicitations pour ma promotion dans l’ordre du Mérite, évoquant mon dévouement au service de l’intérêt général : il l’a fait le 7 juin, jour anniversaire de l’exécution de deux des participants à l’assassinat de mon père.

Cette distinction, que je devrais recevoir le mois prochain des mains du Ministre qui m’y a proposé, je la dédie à toutes les victimes de l’OAS en Algérie et en France, civils, militaires, élus, magistrats, fonctionnaires, défenseurs des institutions et des valeurs de la République.

Et pour marquer le cinquième anniversaire de cette stèle dont je viens de vous lire la dédicace, je vous annonce le lancement, ce jeudi matin, du site Internet de l’ANPROMEVO (http://anpromevo.com), auquel je souhaite de contribuer à l’instauration d’un partenariat mémoriel avec l’Algérie.

Avant la minute rituelle de silence, place au dépôt de gerbes, successivement, par le Comité Vérité et Justice pour Charonne, par l’association Les amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons, par la FNACA (dont je salue respectueusement le porte- drapeau national) et par l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS.

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